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Explication du Saint Evangile selon Saint Luc d'après les Saints Pères

St LucChapitre I

1Plusieurs ayant entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, 2suivant ce que nous ont transmis ceux qui ont été des témoins oculaires dès le commencement et sont devenus des ministres de la parole, 3il m'a aussi semblé bon, après avoir fait des recherches exactes sur toutes ces choses depuis leur origine, de te les exposer par écrit d'une manière suivie, excellent Théophile, 4afin que tu reconnaisses la certitude des enseignements que tu as reçus.

St EUSEBE (Hist. Ecclesiastique, III,4). Saint Luc commence son récit en nous faisant connaître la raison qui I'a déterminé à écrire son évangile; c'est que plusieurs avaient eu la prétention téméraire de raconter les choses dont il avait une connaissance plus parfaite : "Plusieurs, dit-ils s'étant efforcé de mettre par ordre l'histoire des choses."

St AMBROISE. (Préf. sur st. Luc). Car, de même que chez le peuple juif, un grand nombre de Prophètes ont prophétisé sous l'inspiration de l'Esprit; tandis que d'autres n'étaient que de faux Prophètes. De même aujourd'hui, sous la nouvelle loi, plusieurs ont entrepris d'écrire des évangiles qui ne sont pas de bon aloi ; c'est ainsi qu'on nous donne un évangile, écrit, dit-on, par les douze apôtres, un évangile que Basilide a eu la prétention d'écrire, un troisième même qui aurait pour auteur Saint Mathias.

St AMBROISE. (Ibid.) Celui qui s'est efforcé de mettre en ordre, n'a dû ses efforts qu'à son travail personnel, et n'en peut espérer aucun résultat; au contraire, les dons et la grâce de Dieu n'exigent point d'efforts et quant la grâce se répand dans une âme, elle l'arrose si largement, que l'esprit de l'écrivain loi d'être stérile, devient d'une inépuisable fécondité. C'est donc avec raison que Saint Luc ajoute : "Des choses qui se sont accomplies parmi nous," ou dont nous avons une connaissance surabondante, car ce qui est abondant ne fait défaut à personne, comme aussi personne ne doute de ce qui s'est accompli, puisque la foi s'appuie alors sur des faits qui en sont la démonstration la plus claire.

St TITE (sur la Préf. de St Luc) Il ajoute : " Des choses," car ce n'est pas dans un corps simplement apparent, comme le prétendent les hérétiques que Jésus a fait son avénement parmi nous, mais comme il était la vérité, c'est réellement dans la vérité qu'il a accompli son œuvre.

St JEAN CHRYSOSTOME.. L'Évangéliste ne s'en rapporte pas seulement à son témoignage personnel, mais il s'appuie exclusivement sur celui des Apôtres, pour donner plus de poids à ses paroles : "Ainsi que nous les ont rapportées ceux qui les ont eux-mêmes vues des le commencement."

St EUSEBE, (Hist. ecclés. 3,4.) Il est donc certain, que c'est dans les enseignements de Saint Paul ou des autres Apôtres qui ont été attachés dès le commencement à la personne du Sauveur, que Saint Luc à puisé la vérité historique de son récit.

St JEAN CHRYSOSTOME. (comme précéd.) Il se sert du mot, "ils ont vu," parce que le témoignage de témoins oculaires des faits, est pour nous le plus ferme motif de crédibilité.

St AMBROISE. Cette dernière expression ne signifie pas que le ministère de la parole s'adressait plutôt à la vue qu'à l'ouïe, mais comme ici, ce Verbe n'était pas un Verbe parlé, mais un Verbe substantiel, Saint Luc veut nous faire comprendre que ce n'est pas d'une parole ordinaire, mais d'une parole toute céleste, que les Apôtres furent les ministres.

St CYRILLE. Saint Jean confirme ce que dit ici Saint Luc, que les Apôtres ont vu ce Verbe de leurs yeux par ces paroles : "Le Verbe S'est fait chair, et Il a habité parmi nous, et nous avons vu Sa gloire," c'est par le moyen de la chair que le verbe s'est rendu de visible.

St AMBROISE. Mais ce n'est pas seulement comme homme revêtu de notre chair qu'ils ont vu notre Seigneur, ils L'ont vu comme Verbe, lorsqu'avec Moïse et Elie, ils ont été témoins de la gloire du Verbe, qui est resté invisible pour ceux qui n'ont pu voir que Son corps.

St THÉOPHILACTE. (préf. sur st. Luc.) Nous pouvons conclure logiquement de ces paroles, que Saint Luc n'a pas été un des premiers disciples du Sauveur, mais qu'il ne l'est devenu que dans la suite. D'autres se sont attachés à Jésus Christ dès le commencement, comme Pierre et les fils de Zébédée.

St THÉOPHILACTE. Il adressa son Évangile à Théophile, c'était un personnage distingué, peut-être même un prince ; car l'épithète d'excellent ne se donnait qu'aux princes et aux gouverneurs, comme nous voyons Saint Paul appeler le gouverneur Festus : "Très excellent Festus."

St JEAN CHRYSOSTOME. Ou encore, afin que vous ayez une certitude inébranlable des vérités que vous avez apprises, en les voyant consignées dans l'Écriture.

St THÉOPHILACTE. Souvent, en effet, nous regardons comme faux des faits qu'on avance dans la conversation, sans qu'on les mette par écrit; si, au contraire, on prend soin de les écrire, nous y ajoutons foi plus volontiers; car, pensons-nous, s'il n'était sûr de la vérité de ce qu'il dit, il ne l'écrirait point

St JEAN CHRYSOSTOME. On peut dire encore que toute cette préface de Saint Luc contient deux choses : dans quelles conditions ceux qui l'ont précédé ( Saint Matthieu et Saint Marc ) ont écrit l'Évangile, et pour quel motif il a entrepris lui-même de l'écrire. Cette expression : "Ils se sont efforcés," peut donc s'appliquer, et à ceux qui n'ont mis la main à cette ouvre que par présomption, et à ceux qui l'ont entreprise dans les conditions de respect et d'honneur qu'elle réclame. Or, le sens douteux de cette expression se trouve précisé par une double explication que Saint Luc nous donne. Premièrement, lorsqu'il dit : "Des choses qui se sont accomplis parmi nous," secondement, quand il ajoute : "Ainsi que nous les ont transmises ceux qui les ont eux-mêmes vues dès le commencement." Ce mot : "ils nous ont transmis, " me paraît encore renfermer un avertissement donné à ceux qui reçoivent l'Évangile de travailler eux-mêmes à sa propagation; car de même que les Apôtres l'ont transmis, ceux qui l'ont reçu doivent à leur tour le transmettre à d'autres. Lorsque les faits évangéliques n'étaient pas encore consignés par écrits, il en résultait bien des inconvénients à mesure qu'on s'éloignait des faits. Aussi ceux qui avaient recueilli ces faits de la bouche des premiers disciples et des ministres du Verbe, agirent-ils sagement en les consignant dans des écrits qui les répandirent dans tout l'univers, dissipèrent les calomnies, prévinrent un fâcheux oubli, et constituèrent ainsi par la tradition l'intégrité des Saints Évangiles.

St Zacharie et Elisabeth
5Du temps d'Hérode, roi de Judée, il y avait un sacrificateur, nommé Zacharie, de la classe d'Abia; sa femme était d'entre les filles d'Aaron, et s'appelait Élisabeth. 6Tous deux étaient justes devant Dieu, observant d'une manière irréprochable tous les commandements et toutes les ordonnances du Seigneur. 7Ils n'avaient point d'enfants, parce qu'Élisabeth était stérile ; et ils étaient l'un et l'autre avancés en âge.

St JEAN CHRYSOSTOME. Saint Luc commence son récit par l'histoire de Zacharie et de la naissance de Jean ; préludant ainsi par le récit d'un moindre prodige au récit d'un prodige plus étonnant. Une Vierge devait être mère, la grâce nous prépare à ce mystère, en nous montrant une femme stérile devenue féconde. ( et hom. 6, in Matth.) Le temps se trouve indiqué par ces paroles : "Dans les jours d'Hérode," et la dignité d'Hérode par ces autres : "Roi de Judée." Cet Hérode était différent de celui qui mit à mort Jean, il était roi, tandis que ce dernier n'était que tétrarque.

St AMBROISE.. La Sainte Écriture nous apprend que pour être vraiment digne de louanges, il faut se rendre recommandable, non seulement par ses qualités personnelles, mais encore par le mérite de ses parents et par l'éclat d'une vertu sans tâche qu'on a reçue d'eux comme précieux héritage. Aussi la noblesse de Saint Jean remonte-t-elle au delà de ses parents jusqu'à ses ancêtres, et tire tout son éclat, non des dignités profanes, mais d'une longue succession de piété et de vertu. L'éloge est donc complet, puisqu'il embrasse la race d'où il descend, les vertus de ses parents, leurs fonctions, leurs actions, leur justice.

St AMBROISE.. L'Évangéliste désigne la race pur les ancêtres en disant : "De la famille d'Abia." c'est-à-dire, d'une famille distinguée entre les premiers familles.

St THÉOPHILACTE. L'Évangéliste veut montrer que Saint Jean descendait légalement de la race sacerdotale, en ajoutant : "Sa femme était de la race d'Aaron, et elle avait nom Elisabeth, "car il n'était point permis de prendre une femme dans une autre tribu que la sienne. Or Elisabeth signifie repos, et Zacharie, souvenir du Seigneur.

St AMBROISE. Il comprend ainsi sous le nom de justice la Sainteté de Ieur vie. Il joute avec beaucoup de sens : "Devant Dieu," car il peut arriver que par un vain désir de popularité on paraisse juste aux jeux des hommes sans l'être devant Dieu, si par exemple cette justice ne vient pas d'une intention simple et droite, mais n'est qu'un mensonge inspiré par le désir de plaire. C'est donc faire d'un homme un éloge complet que de dire : il est juste devant Dieu, car on n'est vraiment parfait qu'au témoignage de celui qui ne peut être trompé. Saint Luc comprend Ies actes de la vie dans l'accomplissement des commandements, et la justice dans l'observation des ordonnances. "Ils marchaient, dit-il, dans les commandements et les ordonnances du Seigneur." Nous marchons dans Ies commandements du Seigneur, lorsque nous obéissons à ses divins préceptes, et nous gardons ses ordonnances, lorsque tous nos actions sont faites avec jugement. Or, nous devons avoir soin de faire le bien, non seulement devant Dieu, mais devant les hommes, et c'est pour cela qu'il ajoute : "d'une manière irréprochable." La conduite est irréprochable lorsque la doctrine et la pureté de l'intention viennent se joindre à la bonté de l'action, et souvent encore une Sainteté trop austère devient l'objet des reproches du monde.

St JEAN CHRYSOSTOME. (Hom. sur la Genèse). Elisabeth ne fut par la seule stérile, les épouses des Patriarches, Sara, Rebecca, Rachel (ce qui était un sujet de honte chez les anciens), I'étaient aussi, et nous ne pouvons pas dire que leur stérilité fût une punition, puisque toutes étaient justes et vertueuses. Si donc Dieu permit qu'elles fussent stériles, c'était pour nous préparer à croire sans difficulté le mystère d'une Vierge qui enfante le Seigneur, après avoir cru préalablement à la fécondité des femmes stériles.

St THÉOPHILACTE. Dieu veut encore vous donner une autre leçon, c'est que la loi de Dieu demande beaucoup plus la fécondité spirituelle des enfants que la fécondit charnelle; aussi voyez-vous Zacharie et Elisabeth avancés dans la vie, beaucoup moins selon le corps que selon l'esprit, disposant des degrés dans leur cœur, regardant leur vie comme un jour brillant et non comme une nuit ténébreuse, et marchant dans la décence comme durant le jour.

8Or, pendant qu'il s'acquittait de ses fonctions devant Dieu, selon le tour de sa classe, 9il fut appelé par le sort, d'après la règle du sacerdoce, à entrer dans le Temple du Seigneur pour offrir le parfum.10Toute la multitude du peuple était dehors en prière, à l'heure du parfum.

St AMBROISE.. Zacharie nous paraît ici désigné comme Grand-Prêtre, car le Grand-Prêtre seul pouvait entrer une seule fois l'année dans le second Sanctuaire, non sans y porter du sang qu'il offrait pour ses propres péchés et pour ceux du peuple.

St AMBROISE.. Zacharie est ce Grand-Prêtre désigné par le sort, parce que le véritable Grand-Prêtre est encore inconnu, car celui qui est choisi au sort ne doit point son élection au suffrage des hommes. Le Grand-Prêtre était donc demandé au sort, et il était la figure d'un autre, c'est-à-dire, du Grand-Prêtre véritable et éternel qui devait réconcilier le genre humain avec Dieu son Père, non par Ie sang des victimes, mais par son propre sang. Alors c'était par ordre de famille que les Prêtres se succédaient, maintenant le Sacerdoce est éternel.

zacharie
11Alors un Ange du Seigneur apparut à Zacharie, et se tint debout à droite de l'Autel des parfums. 12Zacharie fut troublé en le voyant, et la frayeur s'empara de lui. 13Mais l'Ange lui dit : Ne crains point, Zacharie; car ta prière a été exaucée. Ta femme Elisabeth t'enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jean. 14Il sera pour toi un sujet de joie et d'allégresse, et plusieurs se réjouiront de sa naissance.

St JEAN CHRYSOSTOME. (hom. 2 sur l'incompréhensibilité de Dieu.) Zacharie étant entré dans le temple pour offrir à Dieu les prières de tout le peuple, comme médiateur entre Dieu et les hommes, vit l'Ange debout dans le Sanctuaire : "Et l'Ange du Seigneur lui apparut." L'expression : "Il lui apparut," est très juste, puisque Zacharie l'aperçut tout à coup, et c'est ni ainsi que l'Écriture s'exprime lorsqu'elle parle de Dieu ou des Anges ; les choses que l'on voit sans y être préparé, elle dit qu'elles apparaissent. En effet, on ne voit pas de la même manière les choses sensibles et celui dont la nature est invisible, et qui ne se découvre que lorsqu'Il le veut.

St JEAN CHRYSOSTOME. Cette apparition fût sans obscurité et différente de celles qui ont lieu dans le sommeil; il s'agissait d'un événement extraordinaire, il fallait donc une vision évidente et certaine.

St JEAN DAMASCENE. (de la foi orthodoxe lib. 11.) Les Anges cependant n'apparaissent pas aux hommes dans leur propre nature, mais ils revêtent pour se rendre visibles, la forme que Dieu Lui-même a déterminée.

St BASILE LE GRAND. Il dit : "A la droite de l'Autel de l'encens," parce qu'il y avait un autre Autel réservé pour les holocaustes.

St AMBROISE. C'est par une raison pleine de mystère que l'Ange apparaît dans le Temple, il venait annoncer la venue du véritable Grand-Prêtre, et Dieu préparait déjà le Sacrifice céleste dont les Anges eux-mêmes sont les ministres, car nous ne devons pas douter de la présence des Anges au Sacrifice où Jésus Christ est immolé. Il apparut à droite de l'Autel de l'encens, parce qu'il apportait le signe de la miséricorde divine : "Le Seigneur est à ma droite, afin que je ne sois pas ébranlé." (Ps 15).

St JEAN CHRYSOSTOME. (hom. 2, sur l'incompréhensibilité de Dieu) L'homme, quelque juste qu'il soit, ne peut voir apparaître un Ange sans éprouver un sentiment de crainte, aussi Zacharie ne pouvant ni supporter l'aspect de l'Ange, ni soutenir l'éclat qui l'environne, se trouble : "Et Zacharie fût troublé." Lorsque le conducteur d'un char s'épouvante et abandonne les rênes, les coursiers s'emportent, et le char se renverse; ainsi en est-il de l'âme, toutes les fois qu'elle est sous le poids de la crainte ou de l'inquiétude : "Et la frayeur le saisit," ajoute l'Evangéliste.

St ATHANASE D'ALEXANDRIE. (vie de St Antoine) Voici donc un moyen facile de distinguer les bons esprits des mauvais; si la joie succède à la crainte, c'est un indice certain de l'intervention divine ; car la paix de l'âme est un signe et comme un fruit de la présence de la majesté divine, mais si la frayeur qu'on a éprouvée persévère, c'est l'ennemi du salut qui en est la cause.

St AUGUSTIN.. (Quest. évang., liv. 11, q.1) Remarquons ici tout d'abord, qu'il n'est point vraisemblable qu'au moment où il offrait le Sacrifice pour les péchés du peuple ou pour son salut et sa rédemption ; Zacharie, ce vieillard, dont la femme était avancée en âge, ait prié Dieu de lui accorder des enfants, car personne ne songe à demander dans ses prières ce qu'il n'a aucune espérance d'obtenir. Or Zacharie avait si peu l'espérance d'avoir des enfants qu'il refuse de croire à la promesse de l'Ange. Ces paroles donc : "Votre prière a été exaucée," doivent s'entendre de la prière qu'il faisait pour le peuple. Mais comme le salut, la rédemption de ce peuple et la rémission des péchés devaient avoir lieu par Jésus Christ ; I'Ange annonce de plus à Zacharie qu'il lui naîtrait un fils destiné à être le précurseur du Christ.

St JEAN CHRYSOSTOME. Ou bien pour preuve que sa prière est exaucée, il lui prédit la naissance d'un fils qui devait un jour proclamer : "Voici l'Agneau de Dieu."

St THÉOPHILACTE. À cette question secrète de Zacharie : comment serai-je assuré de cette promesse ? l'Ange répond : En voyant Elisabeth devenir mère d'un fils, vous ne pourrez douter que les péchés du peuple ne soient remis.

St AMBROISE. de Milan. Ou bien encore, la plénitude et l'abondance sont les caractères des bienfaits de Dieu, ils ne sont point renfermés dans d'étroites limites, mais ils embrassent dans leur abondance tous les biens réunis; aussi l'Ange annonce d'abord à Zacharie l'heureux effet de sa prière, puis ils lui prédit que sa femme, jusqu'alors stérile, lui donnerait un fils dont il indique le nom par avance : "Vous lui donnerez le nom de Jean,"

St JEAN CHRYSOSTOME. Remarquons aussi que les hommes qui devaient donner dès leur plus tendre jeunesse des signes d'une vertu éclatante, ont reçu dès lors leur nom du ciel, tandis que ceux dont la vertu ne devait se manifester que dans le cours de leur vie, n'ont reçu ce nom que plus tard.

St AMBROISE. de Milan. Les Saints ne sont pas seulement la joie et la consolation de leurs parents, mais encore le salut d'un grand nombre : "Plusieurs, ajoute l'Ange, se réjouiront de sa naissance" Apprenons ici à nous réjouir de la naissance des Saints ; que les parents apprennent à en rendre grâces à Dieu, car c'est une grâce insigne que Dieu leur fait, lorsqu'il leur donne des enfants destinés à perpétuer leur race et à recueillir l'héritage de leurs biens.

St Jean le Baptiste
15Car il sera grand devant le Seigneur. Il ne boira ni vin, ni liqueur enivrante, et il sera rempli de l'Esprit Saint dès le sein de sa mère ; 16il ramènera plusieurs des fils d'Israël au Seigneur, leur Dieu. 17il marchera devant Dieu avec l'esprit et la puissance d'Élie, pour ramener les cœurs des pères vers les enfants, et les rebelles à la sagesse des justes, afin de préparer au Seigneur un peuple bien disposé.

St AMBROISE. de Milan. Après avoir annoncé que la naissance de Jean serait pour plusieurs un sujet de joie, l'Ange prédit la grandeur de sa vertu : "Il sera grand devant le Seigneur," etc. Il n'est point ici question de la grandeur du corps, mais de la grandeur de l'âme. Or, devant Dieu, la grandeur de l'âme n'est autre que la grandeur de la vertu.

St THÉOPHILACTE. Il en est beaucoup à qui l'on donne le nom de grands, mais c'est devant les hommes, et non pas devant Dieu, tels sont les hypocrites. Les parents de Jean, au témoignage de l'Évangéliste, étaient eux-mêmes justes devant Dieu.

St AMBROISE. de Milan. Jean n'a point reculé les frontières d'un empire, il n'a point moissonné de lauriers à la suite d'une glorieuse victoire; mais il a fait plus, il a prêché dans le désert, il a foulé au pieds les délices du monde, et la mollesse des plaisirs des sens par l'étonnante austérité de sa vie. "Il ne boira, dit, l'Ange, ni vin, ni aucune liqueur enivrante."
Celui qui reçoit ainsi l'abondance de l'Esprit Saint, reçoit en même temps la plénitude des plus éminentes vertus. Voyez, en effet, Saint Jean avant de naître, étant encore dans le sein de sa mère, il fait connaître la grâce qu'il a reçu, lorsqu'en tressaillant dans Ie sein qui le renferme, il annonce l'avènement et la présence du Seigneur. Cette vie de la nature est toute différente de la vie de la grâce, la première commence à notre naissance pour finir à notre mort; la vie de la grâce, au contraire, n'est point limitée par les années, elle ne s'éteint point à la mort, elle n'est pas exclue du sein qui nous porte.

St SIMÉON LE NOUVEAU THÉOLOGIEN. Mais quelles seront les œuvres que Jean accomplira sous la conduite de l'Esprit Saint, les voici : Il convertira plusieurs des enfants d'Israël au Seigneur leur Dieu.

St AMBROISE. de Milan. Nous n'avons d'ailleurs nul besoin qu'on nous prouve que Saint Jean a converti Ies cœurs en grand nombre, alors que les écrits des Prophètess et le Saint Évangile nous l'attestent. La voix de celui qui crie dans le désert : "Préparez la voie du Seigneur, rendez droits Ses sentiers," ce baptême que le peuple venait recevoir en foule, ne sont-ils pas une preuve des conversions qu'il opérait dans la multitude ? Car ce n'était pas lui-même, mais le Seigneur qui était l'objet des prédications de ce précurseur du Christ. C'est pourquoi l'Evangéliste ajoute : " Et il marchera devant Lui," etc. Il a marché, en effet, devant Lui, puisqu'il a été Son précurseur dans Sa naissance comme dans Sa mort, et ces autres paroles : "Dans l'esprit et la vertu d'Elie "; car l'esprit qui avait animé Elie vint remplir Jean, aussi bien que sa vertu.
L'esprit, en effet, est inséparable de la vertu, comme la vertu de l'esprit, voilà pourquoi l'Ange joint l'esprit à la vertu. Car le Saint Prophète Elie eut à la fois une grande vertu et une grâce surabondante, une grande vertu pour ramener à la foi le cœur des peuples infidèles, la vertu de pénitence, la vertu de patience, et l'esprit de prophétie. Ces deux grands hommes eurent d'autres traits d'analogie, Elie habitait le désert, Jean y passa toute sa vie. Elie ne rechercha jamais les bonnes grâces d'Achab, Jean dédaigna la faveur d'Hérode; l'un divisa les eaux du Jourdain, l'autre en fit un bain salutaire ; Jean fut le précurseur du premier avènement du Seigneur, Elie doit l'être du second.

GREC. Ou bien encore, les Juifs étaient parents de Jean et des Apôtres, et cependant par orgueil autant que par incrédulité, ils se déchaînaient contre l'Evangile. Que fit alors Jean, et après lui les Apôtres ? comme des enfants pleins de douceur, ils découvraient la vérité à leurs pères, et cherchaient ainsi à les rendre participants de leur propre justice et de leur prudence. C'est ainsi qu'Elie doit convertir les restes des Hébreux à la vérité prêchée par les Apôtres.

St THÉOPHILACTE. Ou encore : Jean a préparé un peuple qui n'était pas incrédule, mais parfait, c'est-à-dire prêt à recevoir Ie Christ.

Archange Gabriel
18Zacharie dit à l'Ange : À quoi reconnaîtrai-je cela ? Car je suis vieux, et ma femme est avancée en âge. 19L'Ange lui répondit : Je suis Gabriel, je me tiens devant Dieu; j'ai été envoyé pour te parler, et pour t'annoncer cette bonne nouvelle. 20Et voici, tu seras muet, et tu ne pourras parler jusqu'au jour où ces choses arriveront, parce que tu n'as pas cru à mes paroles, qui s'accompliront en leur temps. 21Cependant, le peuple attendait Zacharie, s'étonnant de ce qu'il restait si longtemps dans le temple. 22Quand il sortit, il ne put leur parler, et ils comprirent qu'il avait eu une vision dans le temple; il leur faisait des signes, et il resta muet.

St JEAN CHRYSOSTOME. (sur l'incompréhensibilité de Dieu.) Zacharie, ne considérant que son âge et la stérilité de sa femme, se laisse aller au doute : "Et Zacharie dit à l'Ange : A quoi pourrai-je connaître la vérité de ce que vous m'annoncez ?" en d'autres termes : Comment cela se fera-t-il ? et il donne les raisons qu'il a de douter : "Car je suis vieux," etc. l'âge est contraire, la nature impuissante, je suis sans force pour engendrer, et de son côté la terre est stérile. Ces raisons ne suffisent pas au jugement de quelques-uns, pour excuser le Prêtre Zacharie d'avoir fait toutes ces questions; car quand Dieu parle, on doit recevoir Sa parole avec foi ; vouloir la discuter, c'est faire preuve d'un esprit opinâtre. Aussi voyez la suite : Et l'Ange lui répondit : Je suis Gabriel qui suis toujours présent devant Dieu.."
Dès lors donc que vous savez que je suis envoyé de Dieu, ne voyez plus rien de naturel dans ce que je vous dis; car je ne parle point de moi-même, je ne fais que vous transmettre les volontés de Celui Qui m'a envoyé. En effet, la vertu, le mérite d'un envoyé, c'est de ne rien dire de sa propre autorité

St GRÉGOIRE. (hom. 34 sur les Évang.) En effet, lorsque les Anges viennent nous trouver, ils remplissent extérieurement leur ministère sans interrompre intérieurement l'exercice de la contemplation; car si leur esprit est limité, I'Esprit souverain qui est Dieu, n'a point de bornes. Ainsi les Anges sont toujours devant Lui, même quand ils sont en mission, puisque c'est dans l'immensité de Dieu qu'ils accomplissent leur message.

St JEAN CHRYSOSTOME. Les liens qui se rendent impuissant, sont transportés à l'organe de la voix ; le Sacerdoce dont il est revêtu n'est point une raison pour qu'il soit épargné, au contraire, la punition sera plus grande, parce qu'il devait donner aux autres l'exemple d'une foi plus vive.

St THÉOPHILACTE. Le mot grec kofos signifie également sourd, on peut donc donner ce sens aux paroles de l'Ange : Puisque vous ne croyez point, vous deviendrez sourd, et vous ne pourrez plus parler. Juste châtiment de sa double faute, la désobéissance est punie par la surdité, et la contradiction par la mutité.

St JEAN CHRYSOSTOME. L'Ange dit : Et voici, c'est-à-dire à l'instant même. Considérez toutefois la miséricorde de Dieu dans ce qui suit : "Jusqu'au jour où ces choses arriveront ;" comme s'il lui disait : Lorsque l'accomplissement de Ma prédiction en aura démontré la vérité, et que tu auras reconnu la justice de ton châtiment, alors tu en seras délivré. Il lui en fait aussi connaître clairement la cause : "Parce que vous n'avez pas cru à Mes paroles, qui s'accompliront en leur temps ;" méconnaissant ainsi la puissance de Celui Qui m'a envoyé, et devant Lequel je suis toujours présent. Or, si tel fut le châtiment de Zacharie pour avoir refusé de croire à un enfantement naturel, comment ceux qui blasphèment la naissance ineffable pourront-ils échapper à la vengeance divine ?

St ANTIPATER DE BOSTRA. Tandis que ces choses se passaient dans l'intérieur du Temple, la multitude qui attendait au dehors était surprise de ce que Zacharie tardait à revenir : "Cependant le peuple attendait Zacharie, et s'étonnait de ce qu'il demeurait si longtemps dans le Temple." Chacun se livrait à ses conjectures et donnait ses suppositions; Zacharie étant enfin sorti, leur apprit, par son silence forcé, ce qui lui était arrivé dans l'intérieur du Temple. " Et étant sorti, il ne pouvait leur parler."

St THÉOPHILACTE. Zacharie faisait des signes au peuple qui lui demandait probablement pourquoi il était devenu muet : "Et il leur faisait des signes… et il demeura muet."

St AMBROISE DE MILAN. Un signe est un mouvement du corps qui n'est point accompagné des paroles, et qui cherche à faire connaître la volonté, sans pouvoir l'exprimer complètement.

Conception de St jean
23Lorsque ses jours de service furent écoulés, il s'en alla chez lui. 24Quelque temps après, Elisabeth, sa femme, devint enceinte. Elle se cacha pendant cinq mois, disant :25C'est la grâce que le Seigneur m'a faite, quand Il a jeté les yeux sur moi pour ôter mon opprobre parmi les hommes.

St AMBROISE DE MILAN. Pourquoi se tenait-eIle cachée, si ce n'est par un sentiment de pudeur ? Il est en effet pour les époux un temps déterminé par la nature, où c'est chose louable de chercher à avoir des enfants; lorsqu'on est dans la vigueur de l'âge, et qu'on peut espérer d'en obtenir. Mais lorsqu'on atteint les limites d'une vieillesse presque épuisée et qu'on arrive à cet âge, où l'on est plus propre à élever des enfants qu'à les engendrer, il y a une espèce de honte pour une femme de porter les signes d'une fécondité bien que légitime, d'être chargée d'un fardeau qui convient à un autre âge, et d'une grossesse qui n'est plus de saison. Elle avait donc de la honte à cause de son âge; nous pouvons comprendre par là qu'Elisabeth et Zacharie n'avaient plus ensemble les rapports qu'ont entre eux les époux; car si elle n'avait pas eu de honte de remplir les devoirs du mariage jusque dans sa vieillesse, elle n'en aurait pas eu davantage de devenir mère. Cependant faissons-la rougir du poids de la maternité tant qu'elle ignore ce qu’elle a de mystérieux. Bientôt, celle qui se dérobait aux regards, parce qu'elle était devenue mère, commence à se glorifier, parce qu’elle porte un Prophètes dans son sein.

St JEAN CHRYSOSTOME. C’est-à-dire il a fait cesser ma stérilité, en m’accordant un don qui dépasse les forces de la nature, et une pierre inféconde a produit des épis verdoyants, il m’a délivré de l’opprobre de la stérilité en me rendant mère, "dans les jours où Il m’a regardée pour effacer mon opprobre d’entre les hommes."

St AMBROISE. de Milan. Car c’est une espèce de honte pour les femmes d’être privées du fruit de l’union des époux, puisqu’elles n’ont point d’autre raison de se marier.

St JEAN CHRYSOSTOME. C'est donc pour Élisabeth une double joie d’être affranchie de l’opprobre de la stérilité, et de mettre au monde un enfant illustre; car ce n’est pas ici comme pour les autres, l’union des époux seule, mais la grâce divine qui a été principe de cette naissance.

St AMBROISE. de Milan. Le peuple tout entier devient comme muet dans la personne d'un seul, parce qu'il parlait à Dieu par l'intermédiaire d'un seul; la parole de Dieu a passé aussi jusqu'à nous, et elle n'est point muette au milieu de nous : celui-ci est muet qui ne comprend pas la loi. Pourquoi, en effet, celui gui ne peut émettre aucun son articulé vous paraîtrait-il plus muet que celui qui n’a aucune connaissance des Saints Mystères ? Le peuple juif ressemble à un homme qui fait des signes, lui qui ne peut rendre raison de ce qu’il fait.

Annonciation
26Et au sixième mois, l'Ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, nommée Nazareth, 27à une vierge, fiancée à un homme dont le nom était Joseph, de la maison de David ; et le nom de la vierge était Marie 28Et l'Ange étant entré auprès d'elle dit : Je Te salue, Toi que Dieu fait jouir de Sa faveur ! Le Seigneur est avec Toi ; Tu es bénie entre les femmes. 29et elle, le voyant, fut troublée à sa parole ; et Elle raisonnait en elle-même sur ce que pourrait être cette salutation. 30Et l'Ange lui dit : Ne crains pas, Marie, car Tu as trouvé grâce auprès de Dieu. 31Et voici, Tu concevras dans Ton Ventre, et Tu enfanteras un Fils, et Tu L'appelleras Jésus. 32Il sera grand et sera appelé le Fils du Très-Haut ; et le Seigneur Dieu Lui donnera le Trône de David son Père; 33et Il régnera sur la maison de Jacob à toujours, et il n'y aura pas de fin à Son Royaume.

St BASILE LE GRAND. (sur Isaïe.) Les esprits célestes ne viennent pas à nous de leur propre mouvement, c’est Dieu Qui les envoie lorsque notre utilité l’exige ; car leur occupation est de contempler l’éclat de la divine sagesse. "L’Ange Gabriel fut envoyé," etc.

St GRÉGOIRE. (hom. 34 sur les Évang.) Ce n'est point un Ange quelconque, mais l'archange Gabriel qui est envoyé à la Vierge Marie. Il n'appartenait, en effet, qu'au plus grand des Anges de venir annoncer le plus grand des événements. L'Écriture lui donne un nom spécial et significatif, il se nomme Gabriel, qui veut dire force de Dieu. C'était donc à la force de Dieu qu'il était réservé d'annoncer la naissance du Dieu des armées, du fort dans les combats qui venait triompher des puissances de l'air.

St AUGUSTIN.. (de la Sainte Vierge, chap. 15) La virginité seule était digne d'enfanter Celui Qui, dans Sa naissance, n'a pu avoir d'égal. Notre chef, par un Miracle éclatant, devait naître d'une vierge selon la chair, et figurer ainsi que l'Eglise vierge donnerait à ses membres une naissance toute spirituelle.

St JEROME. (sermon sur la Dormition). C'est avec raison qu'un Ange est envoyé à une vierge ; car la virginité a toujours été unie par des liens étroits avec les Anges. Eu effet, vivre dans la chair, sans obéir aux inspirations de la chair, ce n'est pas la vie de la terre, c'est la vie du ciel.

St JEAN CHRYSOSTOME. (sur St Matth., hom. 4.) L’Ange n’attend pas que l’enfantement ait eu lieu pour en faire connaître le mystère à la Vierge, cet événement l’eût jetée dans le plus grand trouble. C’est avant la conception qu'il accomplit son message, et ce n'est point en songe, mais dans une apparition visible et solennelle, telle que l'exigeait avant l'accomplissement, l'importance de l'événement qu'il venait lui annoncer.

St AMBROISE. de Milan. L'Ecriture établit clairement ces deux choses, qu'elle était épouse et vierge. "Elle était mariée," etc. Vierge, ce qui la sépare de tout commerce avec un homme; épouse, pour que sa virginité fût à l'abri de tout déshonneur, alors que sa grossesse aurait été pour tous un indice de corruption. Le Seigneur aima mieux en voir quelques-uns douter de Sa naissance immaculée, que de la pureté de Sa mère. Il savait combien l’honneur d’une vierge est délicat, combien sa réputation fragile, et Il ne voulut pas que la foi à Sa naissance miraculeuse s’élevât sur le déshonneur de Sa mère. la virginité de Marie a donc été inviolable dans l’opinion des hommes, comme Elle l’était en Elle-même. Il ne fallait pas laisser pour excuse aux vierges, dont la réputation est malheureusement douteuse, que la Mère du Sauveur Elle-même n’avait pas été à l’abri du soupçon et du déshonneur. Que pourrait-on reprocher aux Juifs aussi bien qu'à Hérode, s'ils n'avaient persécuté que le fruit de l'adultère ? Comment Jésus lui-même aurait-il pu dire : "Je ne suis point venu détruire la loi, mais l’accomplir, s’Il eût commencé par une violation de la loi, la loi condamnant l’enfantement de toute personne non mariée ? Rien, d’ailleurs, ne donne plus de créance aux paroles de Marie que ce mariage, et n’éloigne davantage tout soupçon de mensonge. Qu’elle fût devenue mère sans être mariée, elle eût paru vouloir couvrir sa faute sous le voile du mensonge ; étant mariée, au contraire, elle n'avait aucune raison de mentir, puisque la fécondité des épouses est tout à la fois la récompense et le privilège du mariage. Une raison non moins importante, c'est que la virginité de Marie mettait en défaut le prince du monde; en la voyant engagée dans les liens du mariage, il ne pouvait avoir aucun soupçon de son enfantement virginal.

St AMBROISE. de Milan. Reconnaissez la Vierge à ses mœurs. Elle est seule dans l'intérieur de sa demeure, loin de tous les regards des hommes, un Ange seul peut arriver jusqu'à elle : "L'Ange étant entré où Elle était," etc. Il ne faut point qu'Elle soit déshonorée par une conversation indigne d'Elle, c'est un Ange qui est chargé de La saluer.

St GRÉGOIRE DE NYSSE.. (discours sur la Nativité) Le discours qu'il Lui adresse est opposé à celui que la première homme entendit autrefois. Pour Éve l'enfantement dans la douleur fui la juste punition de son péché; pour Marie, la tristesse fait place à la joie, où l'Ange lui annonce le sujet d'une joie bien légitime, en lui disant : "Je Te salue." Il ajoute : "Pleine de grâce," et il proclame ainsi qu'Elle est digne de l'union qu'il vient Lui annoncer. Car cette plénitude de grâce est comme la dot destinée à Son époux ; en effet, les paroles de l'Ange conviennent tour à tour, les unes à l'épouse, Ies autres à l'Epoux.

St JEROME. (sermon sur la Dormition) Oui Elle est pleine de grâce, car la grâce n’est donnée aux autres créatures que partiellement et avec mesure; Marie l’a reçu toute entière et dans sa plénitude. Oui Elle est vraiment pleine de grâce, Elle par Qui toute créature a été inondée des eaux abondantes de l’Esprit Saint. Celui qui avait envoyé Son Ange à cette divine Vierge était déjà avec Elle, le Seigneur avait précédé Son ambassadeur; et le Dieu qui remplit tout de Son immensité, ne pouvait être retenu par la distance des lieux : " Le Seigneur est avec Toi."

St AUGUSTIN.. (sermon 14 sur la Nativité du Seigneur) Il est avec Toi plus qu’Il n’est avec moi ; car Il est Lui-même dans ton cœur, Il s’incarne dans Tes Entrailles, Il remplit ton Ame, Il remplit Ton Sein.

GREC. (ou Géom.) C’est là Ie complément de l'ambassade céleste, le Verbe de Dieu contracte comme un époux une union incompréhensible à la raison; engendrant tout à Ia fois et engendré,Il S'associe intimement toute la nature humaine. Les dernières paroles de l'Ange sont le couronnement et l'abrégé de tout ce qui précède : "Tu es bénie entre les femmes," c'est-à-dire seule entre toutes Ies femmes ; par là même toutes les femmes seront bénies en Toi, comme tous les hommes en Ton Fils, ou plutôt les uns et les autres seront bénis en vous deux. En effet, c'est par une femme et un homme que le péché et la douleur sont entrés dans le monde ; c'est aussi par une femme et par un homme que la bénédiction, que la joie sont appelées et répandues sur toute créature.

St AMBROISE. de Milan. Reconnaissez encore la Vierge à Sa pudeur ; Elle fut alarmée : "Ayant entendu ces paroles, Elle en fût troublée." C'est le propre des vierges d’être accessible à la crainte, de trembler à l’approche d’un homme, de redouter tout entretien avec lui. Apprenez de là, ô vierges, à éviter toute licence dans vos paroles, puisque Marie redoute la salutation d’un Ange.

GREC. (ou Géom.) Comme ces visions du ciel Lui étaient familières, ce n’est point à la vision elle-même, mais aux paroles de l’Ange que l’Evangéliste attribue Son trouble : "Ayant entendu ces paroles, Elle en fut troublée." Remarquez encore tout à la fois la pudeur et la prudence de cette Divine Vierge, les sentiments de Son âme, les paroles qui sortent de Sa bouche. Elle entend parler de joie, de bonheur, Elle examine ce qu'on Lui dit, Elle ne résiste pas ouvertement par incrédulité, Elle ne croit pas aussitôt à la légère, Elle évide à la fois la légèreté d’Ève, et l’obstination de Zacharie : "Et Elle se demandait ce que pouvait être cette salutation." Car Elle ignorait encore la grandeur du Mystère qui allait s'accomplit en Elle. Cette salutation est-elle inspirée par la passion, comme serait celle d’un homme à une vierge ? Ou bien est-elle divine, puisqu'on fait intervenir Ie nom même de Dieu : "Le Seigneur est avec Toi."

St AMBROISE.. Elle s'étonne aussi de cette nouvelle formule de bénédiction inusitée jusque-là ; car elle était réservée à Marie seule.

St PHOTIOS. Comme s’Il disait : Je ne suis point venu pour Te tromper, mais pour apporter le pardon de l’ancienne déception, Je ne viens point non plus porter atteinte à Ton inviolable virginité, mais préparer en Toi une demeure à l’Auteur, au Gardien de toute pureté ; Je ne suis pas l’envoyé du serpent, mais l’ambassadeur de Celui qui détruit son empire, je viens non vous tendre un piège, mais traiter de l’Union mystérieuse que Dieu veut contracter avec Toi. Il ne veut pas La laisser en proie à des pensées inquiétantes, pour sauver l’honneur de la mission divine qu’il vient remplir.

St JEAN CHRYSOSTOME. Celui qui mérite de trouver grâce aux yeux de Dieu, n'a rien à craindre. "Toi Qui a, lui dit-il, trouvé grâce devant Dieu." Comment chacun peut-il à son tour trouver grâce devant Dieu ?, par l'humilité ; car c’est aux humbles que Dieu donne Sa grâce. (Jac 4 et I Pi 5).

St PHOTIOS. Cette Vierge Sainte a trouvé grâce devant Dieu, parce que l'éclat de la chasteté qui était le plus bel ornement de Son âme, en a fait une demeure agréable à Dieu ; et non seulement Elle a gardé une virginité perpétuelle, mais a conservé Son âme pure de toute tâche.

St GRÉGOIRE DE NYSSE. Plusieurs avant Elle, avaient trouvé grâce devant Dieu : aussi l’Ange ajoute ce qui lui est exclusivement propre : "Voilà que Tu concevra dans Ton Sein." Cette expression voilà indique la rapidité, l’actualité de l’opération divine, la Conception a lieu au moment même où il parle.

St SEVERE D'ANTIOCHE. "Tu enfantera dans Ton Sein," paroles qui démontrent que notre Seigneur a pris dans le Sein virginal une chair semblable à notre chair. En effet, le verbe divin venait purifier à la fois la nature humaine, notre naissance, l’origine de notre génération ; Il a donc, à l’exception du péché et du concours de l’homme, été conçu comme nous dans la chair, et porté neuf mois dans le Sein de Sa Mère.

St GRÉGOIRE DE NYSSE.. Mais comme il en est qui conçoivent l’esprit divin et enfantent l’esprit du salut, selon l’expression du Prophète, l’Ange ajoute : "Et Tu enfantera un Fils."

St AMBROISE.. Il en est peu qui, comme Marie, enfantent le Verbe qu'ils ont conçu par la grâce de l’Esprit Saint. Il en est qui rejettent au dehors le Verbe à peine conçu, et Qui ne L’enfantent jamais. Il en est qui portent Jésus Christ dans leur sein, mais sans que jamais il arrive à être formé dans leur cœur.

St GRÉGOIRE DE NYSSE.. (discours pour la Nativité du Seigneur) L'attente de leur délivrance inspire ordinairement aux femmes de vives craintes, aussi l'Ange calme ces appréhensions par les charmes de l'enfantement qu'il annonce : "Et Tu l'appellera Jésus." L'avénement d'un Sauveur suffit pour dissiper tout sentiment de crainte.

GREC. L'Ange dit à Marie : C'est Toi Qui Lui donnerez ce Nom, et non pas Son père ; car Il n'a point de père dans Sa génération temporelle, comme Il n'a point de mère dans Sa génération divine.

St CYRILLE. Ce Nom fut un Nom nouveau donné au Verbe de Dieu et parfaitement en rapport avec Sa naissance selon la chair, selon cette parole du Prophète : "On T' appellera d'un Nom nouveau, que la bouche du Seigneur Te donnera.

GREC. Mais comme ce Nom Lui était commun avec le successeur de Moïse, I'Ange fait ressortir la différence qui Ies sépare en ajoutant : "Il sera grand."

St AMBROISE.. Il a été dit aussi de Jean qu'il serait grand mais d'une grandeur humaine, tandis que Jésus sera grand d'une grandeur toute divine; car la puissance de Dieu Se répand au loin, et la grandeur de la substance divine S'étend au-delà de tous les espaces connus. Elle n'est limitée par aucun lieu, Elle est incompréhensible à l’esprit humain, supérieure à toutes nos pensées, inaccessible aux variations des temps.

St PHOTIOS. Et ne croyez pas que l'Incarnation du Fils de Dieu porte la moindre atteinte à la Majesté divine, au contraire Elle éléve jusqu'aux cieux notre pauvre humanité : "Et Il sera appelé, dit l'Ange, le Fils du Très-Haut." Ce n'est pas Toi qui Lui donnerez ce Nom : "Il sera appelé," et par qui donc, si ce n'est par Son Père qui Lui est consubstantiel ? Celui-là seul Qui a la connaissance parfaite de Son Fils, peut seul aussi Lui donner le Nom Qui Lui convient, ce qu’Il fait quand Il dit : "Celui-ci est Mon Fils bien-aimé." Il L’est de toute éternité, bien que ce Nom ne nous ait été révélé que dans temps pour notre instruction ; aussi l’Ange dit : "Il sera appelé", et non pas, Il deviendra, ou Il sera engendré; car avant tous les siècles Il était consubstantiel à Son Père. Celui donc que l'immensité des cieux ne peut contenir, c'est Lui que Tu concevra, c'est Lui dont Tu deviendra la Mère, c’est Lui que Ton Sein virginal va renfermer.

St JEAN CHRYSOSTOME. Il en est qui regardent comme souverainement étrange, inconvenant même que Dieu fasse Son habitation d'un corps mortel. Mais est-ce que le soleil qui est un corps sensible, et qui pénètre tout de ses rayons, voit pour cela s'obscurcir son éclat ? A plus fort raison Ie Soleil de justice, en prenant un corps très pur dans le Sein d'une Vierge, ne perd rien de Sa pureté; bien loin de là, il ajoute à la pureté, à la Sainteté de Sa Mère.

St BASILE LE GRAND. (à Amphiloque) Ce n'est point sur le trône temporel de David que le Seigneur S'est assis, puisque le gouvernement du peuple juif était passé aux mains d'Hérode ; le trône de David, dont le Seigneur S'est mis en possession, c'est Son royaume immortel. Aussi voyez ce qui suit : "Et Il régnera sur la maison de Jacob éternellement," etc.

St JEAN CHRYSOSTOME. (hom. 7 sur Matth.) La maison de Jacob dont il est ici question sont ceux d’entre les Juifs qui ont cru en lui. Car comme dit Saint Paul : "Tous ceux qui descendent d'lsraël, ne sont pas pour cela Israélites..., mais ce sont les enfants de la promesse qui sont réputés être les enfants d'Abraham." (Rom 11). Ou bien encore, la maison de Jacob, c'est toute l'Eglise, qui est sortie d'une bonne racine, ou qui, d'olivier sauvage qu'elle était, a été greffé sur l'olivier franc par le mérite de sa foi.

GREC. A Dieu seul Il appartient de régner éternellement; aussi, bien que l'Ange déclare qu'Il prendra possession du trône de David par suite de Son incarnation, en tant que Dieu, Il est le Roi éternel des siècles. "Et Son royaume n'aura point de fin." Non seulement comme Dieu, mais aussi en tant qu'Il est homme; dans le temps présent, Il règne sur un grand nombre, à la fin des siècles, Son empire s'étendra sur tous sans exception, lorsque toutes choses Lui seront soumises.

Annonciation
34Marie dit à l'Ange : Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d'homme ? 35L'Ange lui répondit : Le Saint Esprit viendra sur Toi, et la puissance du Très-Haut Te couvrira de Son ombre. C'est pourquoi le Saint Enfant Qui naîtra de Toi sera appelé Fils de Dieu.

St AMBROISE DE MILAN. Marie ne devait point refuser de croire aux paroles de l'Ange, Elle ne devait point non plus accepter témérairement les prérogatives divines qu'il Lui annonçait. Que fait-Elle ? "Or, Marie dit à l'Ange : Comment cela se fera-t-il ?" question bien plus mesurée que celle du Prêtre Zacharie. "Comment cela se fera-t-il ;" demande Marie; "à quoi connaîtrai-Je la vérité de Ce que vous m'annoncez," dit Zacharie. Il refuse donc de croire ce qu'il déclare ne pas comprendre, et il demande pour appuyer sa foi d'autres motifs de crédibilité. Marie, au contraire, se rend aux paroles de l'Ange, Elle ne doute nullement de leur accomplissement, Elle n'est inquiète que de la manière dont elles s'accompliront. Elle avait lu dans les Prophètess : "Voici qu'une vierge concevra et enfantera un fils," (Is 7,14) Elle croit donc à l'accomplissement de cette prophétie ; mais Elle n'avait pas lu comment Elle s'accomplirait, car Dieu ne L'avait pas révélé même au premier des Prophètes ; ce n'était pas à un homme, mais à un Ange, qu'il était réservé de faire connaître un si grand Mystère.

St GRÉGOIRE DE NYSSE. (disc. sur la Nativité du Seigneur) Considérez encore les paroles de cette Vierge si pure. L'Ange lui prédit qu'Elle enfantera, Elle s'attache à Sa virginité, la conservation de sa chasteté est à Ses yeux d'un plus grand prix que l’apparition miraculeuse de l’Ange. Aussi entendez-la dire : "Je ne connais point d’homme."

St BASILE LE GRAND.. Le mot connaître est susceptible de plusieurs sens. On appelle connaissance, la science de Dieu notre Créateur, la notion que nous avons de Ses perfections et des voies qui mènent à Lui, l'observation de Ses commandements, et aussi les rapports des époux entre eux, et c'est dans ce dernier sens qu'il faut l'entendre ici.

St GRÉGOIRE DE NYSSE.. (comme précéd.) Ces paroles de Marie nous dévoilent les pensées les plus intimes de Son âme ; car si Elle eût épousé Joseph pour la fin qu'on se propose dans tout mariage, pourquoi cet étonnement, lorsqu’on Lui parle de conception ? puisqu’Elle pouvait S’attendre à devenir mère un jour selon les lois de la nature. Mais il fallait conserver dans toute Sa pureté ce chaste corps qui avait été offert à Dieu comme une chose sacrée, aussi dit-elle à l’Ange : "Je ne connais point d’homme." Comme si Elle lui disait: Vous êtes un Ange, cependant c’est pour vous chose naturellement impossible à savoir que Je ne connais point d’homme; comment donc deviendrai-Je savoir que Je ne connais point d'homme; comment donc deviendrai-Je mère sans avoir d'époux, puisque Je reconnais Joseph pour mon époux ?

GREC. Considérez comment l'Ange lève le doute de la Vierge, et lui explique la chaste Union et l'Enfantement ineffable qui doit la suivre : "Et l'Ange Lui répondit : L'Esprit Saint surviendra en Toi," etc.